Fragments de silence (2)
C’est une chose étrange que la solitude. Quand elle glissait jusqu’aux larges miroirs de l’armoire murale, le matin, son reflet se jetait sur elle par la gauche et la droite. Elle faisait du café, envahie par le moindre bruit. Chaque son, même minime, engloutissait l’air pâle qu’elle déplaçait le moins possible en bougeant, comme si elle allait déranger les objets à trop s’agiter. Elle entendait l’eau couler dans les canalisations, le voisin prenait sa douche. Toutes les sept minutes, le tram imprimait une très légère vibration au plafond et à la poussière du parquet. Les aboiements d’un chien, le camion des poubelles, les enfants du troisième qui partaient pour l’école, même les gouttes d’eau qui tombaient de sa brosse à dents sur l’éclat du lavabo déchiraient le silence, un bref instant, avant de se taire à nouveau.
Quelque part, dehors, les gens avaient déjà commencé une nouvelle journée de vie.